Laissant Brian Jones piloter la production de I Wanna be Your Man. Brian a donc doublé des parties de la voix de Mick et monter le son de sa propre guitare au mix final. Il ne sera pas étonnant qu'à son retour, et dans le futur, Oldham ait eu le réflexe de faire le contraire. Baisser les sons issus de Jones. Comme il l'avait fait pour le piano de Stu.
Le côté agressif des Stones impressionne. Mick attire beaucoup l'attention mais on comprend que Jones est l'architecte du son bluesy et près des Beatles tout en restant nettement différent. La tournée de 1963 avec Bo Diddley est tout simplement folle. Les Beatles étaient les génies sorties de la bouteille, un génie qui ne retournerait jamais plus dans la bouteille. Les Rolling Stones sortaient de la fumée laissée derrière. Le ying et le yang de leurs sons pouvait fonctionner. Et il semble qu'une génération entière attendait des gens de leur âge leur proposer du fun de leur âge.Peut-être est-ce en raison de la rivalité qui se trouvait entre Mick Jagger et le chanteur des Animals, Eric Burdon, ce dernier se lie naturellement d'amitié avec Brian Jones, de loin le leader de son point de vue, et celui avec lequel il s'amuse en écoutant Howlin' Wolf, Elmore James, mais surtout, courant les filles de la même manière. Burdon sera aussi son partenaire de consommation de drogue dans le futur.
La camaraderie est encore teintée de sombre quand Stu découvre que Jones gagne 5 livres sterling de plus que les autres. Oldham, en campagne contre Easton depuis toujours de toute manière, blâmera Easton d'avoir une entente secrète avec BJ. Leur ami James Pheldge (qui n'avait aucun intérêt politique pouvant marquer ses propos) dira avoir bien vu qu'après la découverte de ce 5 Livres Sterling de plus, plus personne du band n'était vraiment ami de Brian. Oldham, n'ayant pas un grand pas à faire pour se trouver parmi les anti-Brian.
Le lent déclin de Brian Jones commence par 5 Livres Sterling. À partir de maintenant. Jones sera sur les talons de la trinité Jagger-Oldham-Richards. Quiconque a déjà été dans un band peut comprendre la niveau de haine refoulée quand un sentiment de trahison, dans ce qu'on croyait une unité en train de se souder, est vécue. Ça peut même devenir irrationnel dans la jeune vingtaine. Nos éducations pseudo-chrétiennes nous ont dit que nous devenons de meilleures personnes après l'adversité. Ce n'est pas toujours vrai. Quand les Stones offrent sous le couvert de l'anonymat un jingle pour Kellog's et que Jones est inscrit comme unique auteur, Mick, Keith, Bill & Charlie crient au loup.Nankering est un jargon britannique voulant dire se moquer des gens qui ne sont pas de la clique. Souvent au détriment d'un membre de la clique. Brian Jones sera cible facile pour le nankering. En Québécois, ça pourrait se traduire par niaiser. Faire des niaiseries. Déconner entre amis.
Début 64, le succès de la tournée avec Bo Diddley se prolonge et le band est quand même dans un cocktail d'excitation et d'adrénaline. La foule, pas tellement plus basse que leurs scènes, peut-être même parfois au même niveau, envahit celle-ci assez fréquemment et il n'y a rien que les gars ne peuvent faire pour les empêcher. Sinon baisser leur intensité ce qu'il n'ont aucunement envie de faire. Brian, Mick et Bill compétitionnent entre eux pour se dénicher des copines spectacle après spectacle. Tandis qu'Oldham, qui craquait pour Mick, est maintenant très intéressé par le comportement sexuellement ambigüe de Jet Harris, artiste en tournée avec eux. qui se promène parfois nu devant tout le monde. Brian, naturellement exclu de ses propres partenaires musicaux, se tient davantage avec les autres artistes de la tournée. S'ostracise en même temps. À la fin d'une troisième vague de tournée on débute les sessions d'enregistrements à Londres pour un premier album. On prendra 5 jours pour l'enregistrer dans le petit studio Regent. 12 morceaux et seulement 3 composés par eux. On enregistre Bobby Troup, agressivement, on veut juste faire l'amour sur un air de Willie Dixon, on joue Jimmy Reed, Elias McDaniel, Slim Harpo, Chuck Berry, Marvin Gaye, Gene Allison et Rufus Thomas.Les trois autres chansons sont signées Nanker Pheldge, Nanker Pheldge/Phil Spector et Jagger/Richards. Elle sont germes d'un futur proche. Nanker pour leurs sport favori, entre amis, et Pheldge pour leur ami James. Mais surtout pour des droits d'auteurs collectifs comprenant même Andrew Loog Oldham. On utilisera ce nom porte-manteau encore un an. Souvent, c'est aussi parce qu'on a tant emprunté d'un morceau connu d'un autre artiste qu'on veut déguiser les bandits. Peupler la clique anarchique. Phil Spector co-écrit avec le band et y joue des maracas pour un morceau. Le nom Nanker Pheldge comprend 7 personnalités touchant des royautés: Jagger/Richards/Jones/Wyman/Watts/Stewart/Oldham. Le nom sera réutilisé dans les deux dernières années des années 60. Mais le vrai filon, c'est la composition Jagger/Richards. Moins blues. Plus près du son de Mersey. Ce sera un de mes morceaux préférés du band quand je les découvre vers mes 14-15 ans. Oldham trouve aussi fort intéressant que ces deux-là s'intéressent à la création originale.Au printemps 1964, les Beatles sont consacrés par le film et l'album A Hard Day's Night. Les personnalités des Fab Four sont établies clairement. On fera la même chose avec les Stones à l'écrit. Jagger est le gars des affaires de la London School of Economics, Keith est le gentil garçon aux airs farouches, Bill le tranquille sinon plate, Charlie le classy jazzboy, Brian le cool blondinet mais aussi le visionnaire. Cet album, c'est sa déclaration de validité sociale. De blues, et du succès si possible sans compromettre son intégrité.
Dans la version lancée aux États-Unis, on remplace Mona (I Need You Baby) par une chanson de Buddy Holly qui sera le premier single. Tell Me sera le second. On remarque avec intérêt. Surtout l'impact sur le public en tournée.Lancé en juin, le magazine New Musical Express soulage Brian en disant que ce premier album est absolument formidable. Seul, Brian court les micros pour parler de sa vision. Un rare confident et ami de Brian est le photographe Nicky Wright, qui fera la pochette selon ce qu'il sent du band. Brian, plus facile à voir, en blanc, sans veston, Mick, plus loin et plus sombre, qui lui fait dos. Les 3 autres plus loin derrière. Mais une chose reste claire.
Tout le monde lui fait dos.Métaphore criante des 5 prochaines années. Ironiquement, rien ne plaisait à Brian qui visait la perfection. Il n'était jamais satisfait.
Ça donnerait des idées dans un an à ceux qui l'effacerait du leadership du groupe.
Le génie d'Oldham ne sera pas seulement d'avoir enfermé Jagger & Richards les forçant à composer Satisfaction. Ce sera surtout de vendre le duo créatif Jagger/Richards, placé en parallèle du duo créatif Lennon/McCartney et de les rendre frères cosmiques. "Rivaux".
Oldham fait la rencontre "d'une belle blonde aux gros seins" et la signe pour qu'elle soit chanteuse de sa voix de fumeuse. Il demande un morceau à Jagger/Richards. Jagger compose les paroles, Keith trouve la mélodie, avec le musicien de session Big Jim Sullivan, on fignole le reste. Oldham produit et ajoute les arrangements de musique classique. La chanson s'appelle comme celle de Dooley Wilson dans le film Casablanca, mais Oldham fera changer le Time par Tears, La chanson doit être unique.Sur la version que les Stones enregistreront, réalisant le succès de Marianne avec ce morceau, les arrangements seront de Mike Leander. Les Stones visitent les États-Unis pour la première fois, et en conférence de presse, on les méprise un peu en posant comme première question "Do you ever wash?"
Brian lève son bras et lui demande à son tour "Wanna Smell ?". Dean Martin fait rire tout le monde à la télévision en disant qu'ils n'ont pas les cheveux longs, ils n'ont que de plus petits fronts. De passage là-bas on réalise un rêve en enregistrant dans un studio de Chicago une reprise de The Valentinos, suggérée par le DJ Étatsunien Murray the K, et une reprise d'Irma Thomas. Pour ce dernier morceau, Brian, qui trompe Linda Lawrence, enceinte, avec Dawn Molloy, apprend de quelqu'un d'autre que le reste du band est en studio. Il s'y rend pour voir une note lui étant adressée disant "voici les moments où tu dois y placer ton apport". Il prend très mal cette manière de faire. Mais comme toujours, n'en parlera pas aux principaux intéressés. Mick aime prendre des décisions, Brian les fuit, boit de plus en plus et s'auto-détruit en s'intoxicant avec de la drogue. En octobre, on retourne aux États-Unis avec une performance au Ed Sullivan Show. Sur les traces des Beatles, toujours.Mais le vrai rite de passage survient le 29 octobre suivant. Ils doivent jouer après James Brown. Qui est rien de moins que sensationnel. Mick est l'élève le plus studieux de ce qu'il vient de voir de Brown. Lui qui bougeait peu au micro, lui volera tous ses gestes sur scène. La foule réagit immensément à Brown et les Stones doivent suivre. Oldham comprend qu'ils ne seront pas à la hauteur. À moins de retarder leur arrivée. Ils font semblant qu'il y a bris d'équipement, le temps de faire redescendre l'adrénaline que Brown à fait pomper. Ça fonctionne. Jagger et Jones arrivent sur scène en sautant, ce qui surprend, Jagger danse comme James Brown et ce, pour le restant de sa carrière, et Jones tourne le dos au public, ce qui est si baveux que toutes les filles le trouvent encore plus beau malgré de plus en plus lourdes poches sous les yeux.
On a enregistré le second album qui ne comprend que 3 morceaux des Stones sur 12. On bat le fer pendant qu'il est chaud conscient qu'on reprend plus qu'on ne propose de chansons. Aux États-Unis, un mini-album est agrémenté de nouveau matériel, 7 nouvelles pièces, ce qui fait un second album en 1964, pour l'Amérique, en Novembre, d'une douzaine de chansons.On traine à L.A. et Brian s'isole davantage avec Tony Basil, pas encore chorégraphe/chanteuse, mais très jeune et jolie, Dennis Hopper, Dean Stockwell, Jack Nitzsche ou Wallace Breman. Brian écoute Glenn Gould, du jazz, discute culture avec eux. Il se rapproche d'autres univers pour s'éloigner du monde des Stones. Qui ne semble plus le sien.
Tombant malade d'épuisement d'un train de vie qui l'auto-détruisait, il est traité à l'hôpital de Chicago et manque 4 spectacles dès novembre. Ostracisé par lui-même, encore. Seconde fois qu'il n'est pas avec le band en peu de temps. Stu trace une ligne ici dans sa relation avec lui. Il l'endurera, c'est tout. Brian est capitaine d'un bateau qu'il voudrait sien, mais a trop souvent le mal de mer à son goût.
Une chanson d'Howlin' Wolf, composée par Willie Dixon, que Sam Cooke vient de chanter il y a à peine un an, qui était largement guidée par Jones, deviendra un surprenant #1 pour les Rolling Stones, au Royaume-Uni.
Bouée de sauvetage pour Brian.Brian, le créateur, n'est peut-être pas encore le leader qu'on a tassé.
Mais c'était probablement la dernière fois. Ce qui inspirera aussi Keith et Mick, reprenant la barre du navire.
Dans peu de temps. Maintenant on their side.
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